En 2007, Isa Barbier présentait à la Ferme-Asile une barque de plumes dans l’exposition thématique Transversales, consacrée aux relations entre arts et sciences. Cette barque n’a pas fini son voyage et cet automne, Isa Barbier crée en solo une installation in situ dans la grange. Au bénéfice d’une Résidence à la Ferme-Asile (de juin à novembre 2012), l’artiste française élabore une oeuvre centrée sur la mémoire, la disparition et la réapparition.
Isa Barbier écrit : « La barque, non pas en apparition comme autrefois mais en disparition. Elle, effondrée, réduite en miettes, en atomes. Éparpillant l’élément plume, l’élément constitutif de mon travail, dans une figuration transitoire entre ce qui a été, ce qui peut advenir. » Une oeuvre a été faite un jour puis détruite et certains éléments sont conservés – des plumes, par exemple. Ces plumes, mises en attente, peuvent revenir dans une oeuvre postérieure, accompagnées d’autres plumes et d’autres objets. « Exactement comme dans le processus de la vie, dit Isa Barbier. Ce n’est jamais fini. Le corps est réduit en poussières d’atomes. Ces atomes, éléments constitutifs des corps, sont repris dans la construction d’autres corps. C’est un cycle. »
Réapparition
En étroite relation avec l’architecture du lieu, l’installation d’Isa Barbier diffuse un grand souffle de poésie. Même ténue, souple, aérienne et volatile, l’oeuvre de plumes et de lumière habite l’espace, telle une sculpture dans laquelle les visiteurs peuvent voyager. La grande nef de la Ferme-Asile se transforme en navire capable d’emporter l’imagination et de rendre plus légers les âmes et les corps. Isa Barbier conclut : « Surtout ne pas remplir, ne pas encombrer, rester sur le fil ténu, le presque rien, le dépouillement, pour éventuellement sentir l’essentiel, peut-être une goutte d’éternité. »
Des oeuvres d'air et de plumes
Isa Barbier crée des installations in situ éphémères qui ne durent que le temps d’une exposition. Travaillant avec l’élémentaire et la particule (plumes, petits objets, miroirs, fils), ses oeuvres tissent des relations avec la philosophie de Lucrèce, poète latin du Ier siècle av. J.-C., qui a décrit la matière du monde selon deux composantes : les atomes et le vide. De même, Isa Barbier construit ses sculptures à l’aide de petits pleins (les plumes) et de vide (l’air qui circule partout). Toujours liée au vol (de l’oiseau), la plume ne se départit pas de son origine animale et confère une animation particulière à la sculpture. Les contours de l’oeuvre sont labiles, on ne sait où celle-ci s’arrête tant le vide qui la constitue devient visuellement consistant et fort.
L’univers d’Isa Barbier, fait de légèreté et de souplesse, de mouvement et d’ondulations, n’est en rien univoque et simplement « féminin ». Au contraire, rien de plus dramatique et de plus puissant que la légèreté mise au service de la perte, de la disparition, de la finitude, de la mort.
Eléments biographiques
Titulaire d’une maîtrise en arts plastiques obtenue en 1993, Isa Barbier est aussi au bénéfice d’un diplôme de psychologie et d’une licence en histoire de l’art et archéologie (Université d’Aix-en-Provence, 1971). Auparavant, elle a suivi l’Ecole des Arts décoratifs de Nice. Son oeuvre
est reconnue internationalement. Isa Barbier vit à Marseille et expose régulièrement en Suisse à la Galerie Rosa Turetsky de Genève.